UNE CANALISATION ENTERREE PEUT ETRE UNE SERVITUDE APPARENTE

Un très récent jugement obtenu pour le compte de Clients du Cabinet est l’occasion de rappeler qu’une servitude non mentionnée dans un titre et matériellement indécelable n’est pas forcément illégale.

Le cas d’espèce était classique : les acquéreurs d’une maison découvrent l’existence d’une ancienne canalisation d’eaux pluviales toujours en service enterrée sur leur terrain et exigent sa suppression faute d’être mentionnée dans les différents titres de propriété.

Cependant, si en principe une servitude doit être établie par un titre ce n’est pas le cas des servitudes « continues et apparentes » qui peuvent s’acquérir par la « possession de trente ans » (article 695 du code civil)

Dans le cas d’espèce, tout l’enjeu du litige portait sur le caractère apparent ou non de cette canalisation enterrée.

Ce procès a été l’occasion de rappeler que la condition d’« apparence » ne se limite pas à l’apparence matérielle, mais revient à rechercher si le propriétaire du fonds sur lequel la servitude s’exerce a eu ou non connaissance de cette servitude.

Ainsi, quand bien même la création d’une ouverture sur un fond voisin est par nature un ouvrage apparent, la servitude de vue qui en découle ne peut s’acquérir par prescription si elle est exercée sur le toit aveugle du fonds voisin et ne peut être connue de lui (Cass. 3e civ., 29 avr. 1986 : Bull. civ. III, n° 58)

A l’inverse, il est possible de se prévaloir de l’acquisition d’un droit de servitude par prescription, même en présence d’un ouvrage non apparent, s’il est établi que le fonds servant connaissait la présence de l’ouvrage litigieuse pour avoir autorisé son implantation sur son fonds. (Cass. Civ. 3ème 30 janvier 2001 n°98-19.611)

Dans le cas d’espèce, ayant fait la preuve que le 1er propriétaire du fonds servant avait connaissance de cette canalisation enterrée pour avoir autorisé son implantation sur son terrain sans émettre aucune contestation pendant plus de 30 années avant de revendre la parcelle, le Tribunal Judiciaire a donc logiquement consacré l’existence d’une servitude par l’effet de la prescription au bénéfice des Clients du Cabinet et rejeté la demande suppression de cette canalisation.